Si cette période de confinement n’est simple pour aucun enfant, elle l’est d’autant moins pour les petits neuro-atypiques. Preuve en est en cette journée mondiale de sensibilisation à l’autisme qui, cette année, prend une tournure des plus spécifiques pour les familles.
Sans école et sans prise en charge, les enfants atteints de troubles de la sphère autistique vivent un chamboulement d’autant plus impactant. «Ils ont besoin de repères, de routine. En tant que parent, on doit créer de nouvelles habitudes et ce n’est pas simple», indique Noëlle Lecoq, présidente de l’association Pilautis 06 basée à Vallauris qui oeuvre tout au long de l’année pour épauler les élèves dans leur parcours (1) et leurs parents.
Répondant toujours présente, la structure propose des vidéoconférences pour continuer sa mission : «On a notamment envoyé un questionnaire aux familles pour savoir comment se passait la question de l’apprentissage scolaire durant le confinement.
Les problématiques sont nombreuses.» Sans AVS pour les suivre dans ce nouveau quotidien, les enfants et ados doivent suivre un autre rythme. «Le changement est brutal et ils ne le comprennent pas. C’est totalement logique», souligne Florence Ferrari, maître-nageur qui encadre quarante-cinq enfants autistes hebdomadairement dans des cours de sport et de natation via L’Eau pour rayonner et Le Corps pour rayonner au stade nautique d’Antibes. Ses « loulous », elle les connaît bien. Et garde elle aussi le lien avec eux : «Pour certains enfants ce n’est pas envisageable de ne pas aller au parc comme d’habitude ou de ne sortir dehors qu’une fois par jour.»
Un chambardement qui va au-delà de l’activité “sortie” au sens propre comme l’explique Noëlle Lecoq : « C’est un réel besoin pour l’équilibre des enfants. Il faudrait que les parents d’enfants handicapés puissent obtenir une dérogation spécifique pour aller plus loin qu’à un kilomètre de chez eux et que les petits puissent se dépenser. » Parce qu’à l’heure actuelle, le respect stricto sensu du confinement génère le pire:« Des familles me racontent que c’est crise sur crise. Imaginez juste les familles avec plusieurs enfants… » Un cercle vicieux qui inquiète : «Cela peut engendrer un véritable mal-être chez l’enfant, dans la fratrie et dans la famille.» Puisque comme le soulignent les deux femmes engagées : «Beaucoup de mères se retrouvent seules. Avec parfois d’autres petits à gérer. Imaginez juste la gestion des devoirs…»
(Photo illustration Ph. A.)
Ambiance cocotte-minute
Il suffit d’écouter les témoignages des mamans pour comprendre : «Si je ne lui donne aucune consigne, mon fils peut rester des heures à se balancer»,«Mon enfant est en classe Ulis (2), je n’ai aucune consigne des enseignants : comment faire ?»,«Je suis devenue éducatrice…»
Bref, la galère puissance dix. Avec, en prime, la crainte des répercussions : «Ce sont des enfants qui doivent être stimulés tout le temps.» Sinon, leur bulle se renforce et peut dévorer petit à petit les victoires remportées auparavant. Un effet domino qui fait froid dans le dos. «C’est aussi pour cela que la collaboration entre les familles et les enseignants est importante. Pour rassurer.» Puisqu’au-delà du bulletin, un enjeu de taille prend place : l’orientation.
Tout sauf du genre pessimiste, Noëlle Lecoq soulève le positif qui bourgeonne en ce printemps si particulier : «Il y a des applications pédagogiques très utiles qui ont été rendues gratuites. Nous avons aussi des fiches du Docteur Robert Debré de l’AP-HP qui regorgent d’idées pour planifier les journées, travailler avec les enfants. Il y a quelques années ces ressources étaient beaucoup moins accessibles. On voit aussi à quel point la formation des parents est primordiale.»
Puisque tout parent d’enfant autiste le sait bien : devenir spécialiste de son gamin extra-ordinaire c’est la clé pour l’aider.
- Via une convention avec l’Éducation nationale.
- Unités localisées pour l’inclusion scolaire.